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Les Nanas-Benz d’Afrique de l’Ouest : que sont-elles devenues?

  • Carlos Amevor
  • 12 mai 2014
  • 4 min de lecture

Dernière mise à jour : 23 févr. 2023

Les temps ont bien changé ! Les affaires marchent seulement pour une poignée de Nanas-Benz qui en viennent à commercialiser des produits de première nécessité importés de tous horizons par conteneurs.


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« Une Nana-Benz béninoise importe un, deux voire cinq conteneurs. Et chaque conteneur est revendu ensuite à quatre personnes. Or, un conteneur est rempli d’au moins 500 sacs de riz…. Faites le calcul… ». Chérifatou L. commerçante prospère à Missêbo, un quartier d’affaires au cœur de Cotonou, débite son témoignage d’une voix de confessionnal.


Et de renchérir : « Pour regagner la confiance des investisseurs, l’État doit initier un plan de relance de l’économie nationale en s’appuyant sur les institutions incontournables du monde des affaires. À savoir la fédération des femmes entrepreneures et femmes d’affaires du Bénin (FEFA), la direction générale des Impôts et des Domaines, la direction générale du Port autonome de Cotonou, ainsi que le Conseil présidentiel de l’investissement. Et il convient d’accélérer la mise en œuvre des décisions issues des assises de la Table Ronde d’octobre 2012 ; décisions reconnues d’utilité indéniable pour le décollage économique du Bénin. »


Les Nanas-Benz du Togo

Le phénomène des Nanas-Benz - aujourd’hui Nanas-Wax – est entretenu par les commerçantes togolaises de pagne surnommées ainsi à cause des grosses cylindrées allemandes Mercedes-Benz qu’elles conduisaient dans les années 1970-1980. Ce phénomène a éclos à Lomé avant de s’étendre aux pays avoisinants. Femmes à la corpulence imposante, assises devant leurs étalages de tissus hollandais, ayant auprès d’elles des corbeilles remplies de billets de F CFA et circulant dans des Mercedes-Benz. Tel est le mythe associé aux Nanas-Benz du marché de Lomé. Il persiste aujourd’hui même si la donne économique est autre.


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Au commencement de tout…

À l’indépendance, en 1960, de nombreux marchands ont délaissé leur métier pour occuper des postes dans la nouvelle administration publique. Les femmes ont profité de ce vide pour se lancer dans les affaires. Ce sont elles qui ont compris la manne que pouvait représenter le wax hollandais, dont les motifs sont imprégnés de cire avant le bain de teinture.



Se diversifier

Redoutables commerçantes, bien que n’ayant pas fait de grandes études, pour la plupart d’entre elles, ces femmes détenaient le monopole de distribution et de commercialisation du wax hollandais dans toute l’Afrique de l’Ouest où elles revendaient à prix d’or les tissus achetés à meilleur tarif aux fabricants européens. Elles sont devenues un poids majeur de l’économie informelle du Togo.


À l’époque le commerce des tissus wax représentait alors 40% de l’économie du pays. Cependant, les Nanas-Benz connaîtront une période de déclin à la fin des années 1980. Les raisons : la dégradation de la situation socio-politique et économique du Togo, ainsi que la concurrence d’autres commerçants africains qui ont découvert le filon du ravitaillement.


Formant une classe bourgeoise, les Nanas-Benz voient leur renommée dépasser les frontières du Togo. Le marché d’Adawlato a longtemps attiré des commerçants venant de toute l’Afrique de l’Ouest en quête de tissu wax hollandais, réputé pour son excellente qualité. Mais le monopole des Nanas-Benz a fini par s'effondrer. Au début des années 1990, d'autres femmes africaines, en particulier du Nigeria, se lancent à leur tour dans la commercialisation du wax moins cher, et dont elles ont assimilé la technique togolaise de diffusion.


À partir des années 2000, les Nanas-Benz doivent composer en plus avec la concurrence chinoise qui investit le marché togolais, inondant le pays de tissus wax fabriqués à Shanghai et vendus dix fois moins cher. Face à ce constat, les autorités togolaises, de plus en plus dépendantes de l'aide chinoise, semblent impuissantes à juguler le phénomène de déclin.


« La situation que vivent les Nanas-Benz est dramatique. Pour vendre nos produits, nous faisons désormais appel à la débrouillardise », déplore d’un air nostalgique une Nana-Benz au marché de Lomé. Celles qui n’utilisent pas leurs domiciles comme lieu de travail tiennent des stands improvisés dans la rue ou louent à prix d’or des boutiques à des particuliers - jusqu’à 200 000 FCFA (300 euros) par mois, d’après l’Établissement public autonome pour la gestion des marchés (EPAM).


« À l’époque, je possédais cinq Mercedes et faisais beaucoup de voyages d’affaires et d’agrément en Europe. J’ai toujours en mon nom un appartement à Lyon en France… », nous confie Dédé Rose Creppy, figure historique des Nanas-Benz, présidente de l’Association professionnelle des revendeuses de tissus (APRT). Elle vit à Lomé. Pour les jeunes générations (qui se font appeler les Nanettes, pour se démarquer de leurs devancières), c’est de plus en plus difficile. Pour survivre face à la concurrence, elles sont obligées de se diversifier, de vendre d’autres types de produits souvent importés de Chine.


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Le wax, un super tissu pour femmes superbes

Simple pagne porté par les femmes africaines, le tissu wax est devenu un tissu tendance des podiums de mode. Sa fabrication réalisée avec des cires hydrophobes s’inspire des Batiks javanais. Son top qualité est toujours fabriqué par Vlisco et Uni Wax, les marques phares. Toutefois, les contrefaçons et les productions étrangères sont désormais légion. Moins chères, elles inondent les marchés d’Afrique de l’Ouest. Aujourd’hui, les Chinois vendent leur tissu à environ 5 000 francs CFA (8 euros) les 4 mètres. Ce prix est de 5 à 10 fois moins cher que celui du wax hollandais.




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